La JFTL est la conférence annuelle sur le Test et la Qualité logicielle, organisée par le CFTL, la représentation française de l’ISTQB. Cette année, en plus de pouvoir rencontrer la communauté, des changements clés se produisent dans l’écosystème.
La keynote d’ouverture du CIO de Michelin, Yves Caseau, envoie un signal fort sur l’évolution holistique des pratiques de test et de qualité. Les différentes présentations de l’événement comportent également des éléments représentant ce changement dans l’industrie.
Cet article partage les principaux points à retenir de la JFTL 2021 à travers le prisme du Quality Engineering et le framework MAMOS :
- Methods : Les tests et la qualité doivent faire partie intégrante de la livraison logicielle
- Architecture : L’outillage doit évoluer vers plus d’interopérabilité et d’intelligence
- Management : L’accent mis sur les tests évolue clairement vers la création de valeur
- Organization : La qualité doit encore prouver sa valeur pour gagner en influence et en pouvoir
- Skills : Les testeurs ont plus d’options, plus de pouvoir mais plus de responsabilités
La meilleure façon de commencer était de ne pas se sentir dans un silo de test et de qualité. La keynote d’ouverture était un excellent choix.
Le test doit faire partie intégrante de la livraison de logiciels
Yves Caseau a ouvert l’événement avec la keynote « Lean et le test dans la transformation numérique ». Son point de vue et ses messages articulent clairement les enjeux, défis et impératifs de la transformation numérique. L’implication globale pour les organisations est d’aborder la qualité et les tests comme un ensemble de pratiques combinées avec les deux principaux streams d’itérations de l’entreprise : le Design Thinking et la Software Factory.
Les tests et la qualité doivent être présents dès la conception, mis en œuvre et continuellement améliorés pour fournir des logiciels de valeur. Un exemple concret était le besoin de tests continus intégrés au cycle DevOps d’une usine logicielle Lean. De même, les tests continus s’appliquent au flux du Design Thinking, un terme connu sous le nom de DesignOps que nous aborderons dans une prochaine interview. Plus de contenu sur le Lean et l’architecture organisationnelle peuvent être trouvés sur le blog d’Yves Caseau.
La présentation sur la « Politique du zéro bug » par Simone Colosimo de Dashlane était un partage d’expérience dans un contexte réel. Cette méthodologie illustre comment la qualité peut être une partie intégrante de la livraison de logiciels et non une option. Sa mise en œuvre nécessite un alignement de bout en bout dans l’entreprise pour, par exemple, prioriser un correctif de bug au lieu de la prochaine fonctionnalité client. Il s’agit d’un excellent exemple d’application du Quality Engineering en contraignant la livraison du logiciel à la qualité.
L’événement a également mis l’accent sur l’élément de soutien essentiel de la technologie.
L’outillage doit évoluer vers plus d’interopérabilité et d’intelligence
Les produits et outils sont intéressants pour les ingénieurs mais peuvent être dangereux dans leur tendance à perdre de vue l’utilisateur, les objectifs et les processus. Une conférence sur le Test et la Qualité a réuni différents acteurs et vendeurs de solutions. Néanmoins, l’aspect le plus intéressant était de réfléchir à leur avenir concernant les discussions sur l’intelligence, la composition et l’évolutivité.
Un atelier intéressant a été organisé par Smartesting, ajoutant une boucle de rétroaction différente à la gestion des tests. Nous connaissons la séquence traditionnelle de l’expression des besoins, des spécifications, de la mise en œuvre, des tests et des opérations dans l’industrie du logiciel. L’hypothèse est d’augmenter la qualité du produit en commençant sur les opérations, en faisant correspondre l’expérience utilisateur réelle avec nos pratiques de test. Concrètement, Gravity est un produit qui nous permet de découvrir les parcours clients en s’appuyant sur des logs et des algorithmes de clustering se connectant avec Dynatrace par exemple. Dans un second temps, Gravity vise à s’intégrer à un outil de gestion des tests pour laisser le professionnel décider si le parcours doit être couvert ou non par un test, enrichissant son référentiel.
Fait intéressant, cette solution est un excellent exemple de l’impératif technologique en Quality Engineering : intelligence, intégration et automatisation. La partie intelligence permet aux acteurs de se concentrer sur des activités plus importantes que d’essayer d’analyser et de formater des logs. En fournissant une intégration aux outils d’observabilité et de gestion des tests, Gravity démontre la valeur ajoutée d’être une véritable plateforme avec des connecteurs natifs. Au final, c’est une bonne illustration du besoin de boucles de rétroaction bout en bout plus rapides pour améliorer en permanence la qualité.
Les discussions de MyCanal et d’Axa ont également soutenu la nécessité pour les solutions de répondre aux exigences énoncées ; les équipes devant d’abord se concentrer sur leurs priorités du business.
L’accent mis sur les tests évolue clairement vers la création de valeur
« Des legos pour les rassembler tous » était le talk de Marc Soune-Seyne de Welcome To The Jungle. Il énonce clairement la nécessité d’aligner les différents acteurs de la livraison de logiciels vers une création de valeur commune. Non seulement les testeurs doivent être orientés pour plus de transversalité ; un leader qualité doit également impliquer l’ensemble des parties prenantes.
Le travail de gestion dans le Quality Engineering consiste à contraindre efficacement l’ensemble du système à évaluer les exigences de livraison et de qualité. La pratique de la politique zéro-bug est également utile en tant que pratique concrète du Quality Engineering pour contraindre structurellement le cycle de vie de livraison de logiciels. Deux KPI clés qui en résultent soutiennent l’approche : la diminution du Work In Progress (WIP, Backlog) par un facteur 4, plus la réduction du temps d’attente, le deuxième gaspillage le plus coûteux dans les organisations.
La responsabilité du management est de développer, de coacher et de faire grandir l’équipe pour qu’elle se concentre sur la création de valeur pour les utilisateurs dans des écosystèmes complexes. L’intervention de Jean-François Fresi a renforcé cette tendance en identifiant les évolutions clés pour les testeurs dans un contexte accéléré. Nicolas Marchand de CDiscount a illustré l’importance de la qualité de leader dans l’écosystème de mise à l’échelle avec « Framework d’automatisation dans un écosystème de mise à l’échelle ». De nouvelles manières d’animer les équipes font désormais partie de la boîte à outils du management. Diverses conférences ont porté sur l’utilité des techniques de gamification pour les membres de l’équipe ainsi que pour les parties prenantes.
Ces différents thèmes convergent vers l’essentiel du pouvoir organisationnel.
La qualité doit encore prouver sa valeur pour gagner en influence et en pouvoir
Ces évolutions sont prometteuses pour les tests et la qualité. Mais l’essentiel dans les entreprises est la prise de décision, l’influence et le pouvoir. Différentes présentations identifient l’expansion de la qualité hors du silo d’assurance qualité et l’inclusion naturelle de la qualité dans le cycle de vie du logiciel.
Deux interventions démontrent la nécessité d’une action proactive et transversale de qualité. « Tester au-delà de votre projet » d’ Emna Ayadi est le premier exemple de comportement pour étendre la perspective et l’apport de la qualité dans les projets. D’un point de vue organisationnel, l’exposé de Marc Hage Chanine sur « Tout sur les indicateurs dont vous êtes un héros » illustre le besoin de mesures de qualité contextuelles percutantes en dehors d’un silo d’assurance qualité ou technique.
L’évolution de l’industrie du logiciel soulève des questions pour le rôle de testeur et les rôles de qualité. La maturité du mouvement DevOps en est une, partagée dans l’atelier « DevOps et transformation digitale – Quelle place pour les testeurs ?» par JM. Teissier. Les éléments fondamentaux de l’influence et du pouvoir des organisations était le thème de l’atelier d’Olivier Denoo, « Test – Influence & jeux de pouvoir ».
Le pouvoir est un aspect essentiel des organisations, animé par les acteurs les plus qualifiés. D’où l’importance des compétences.
Les testeurs ont plus d’options, plus de pouvoir mais plus de responsabilités
L’évolution de pratiques de test et de qualité plus larges étend la portée et les possibilités des acteurs de QA. En même temps qu’ils ont plus de pouvoir et peuvent apporter plus de valeur ; ils ont aussi plus de responsabilités. Le degré d’exigence, de connaissances et de compétences augmente donc pour répondre au high standard.
Les certifications et descriptions de poste actuelles de l’ISTQB sont un exemple de la diversité des compétences requises pour les tests et la qualité. Les parcours se concentrent davantage sur les aspects de gestion, d’expertise technique ou de processus. Les rôles vont évoluer pour refléter les changements de l’écosystème. Et c’est une partie de l’ensemble complet de compétences requises pour agir sur la grande image. Les différentes interventions sur DevOps, Performance Testing, API Testing dans différents contextes métiers démontrent ce besoin d’une compréhension globale.
Je pense qu’Yves Caseau a été un bel exemple des compétences et de l’émulation nécessaires aux acteurs du logiciel. Il a démontré sa curiosité, son ouverture sur l’extérieur et sa capacité à rester en contact avec la réalité. Il est un lecteur avide de livres tout en étant l’auteur de deux ouvrages. Il a occupé divers postes de CIO capable de parler d’enjeux d’entreprise mais aussi d’implications concrètes dans le code. Il a pris des mesures pour réconcilier les collaborateurs avec la voix du client, générateur de valeur ajoutée.
La livraison continue de valeur est un art complexe à maîtriser. Continuons à développer le Quality Engineering.
Continuons à développer et évoluer vers le Quality Engineering
Cette édition de JFTL a été une bonne occasion de prendre du recul sur l’évolution des pratiques de tests et de qualité. La conclusion la plus prometteuse est la meilleure inclusion de la qualité dans les autres pratiques. C’est maintenant à nous d’en faire une réalité dans nos organisations.
Le niveau d’exigence augmente pour rester pertinent et apporteur de valeur dans l’écosystème. Dans le même temps, nous subissons une pression accrue dans notre organisation et notre capacité de livraison de logiciels attendue par nos utilisateurs.
Nous devons faire évoluer l’ensemble de la chaîne de valeur tout en composant avec les bonnes méthodologies, l’expertise et la technologie. La maîtrise des Methods, de l’Architecture, du Management, de l’Organization et des Skills est indispensable.
Ces tendances nous encouragent à poursuivre le développement du paradigme du Quality Engineering pour un apport continu de valeur à nos utilisateurs. Ce pourrait être une prochaine keynote lors d’une conférence sur les tests, les DevOps et les entreprises, grâce à nos efforts conjoints.
Faisons du Quality Engineering une réalité.