Votre campagne de test mise en place il y a plusieurs mois est complètement ignorée par l’équipe.
Il faut tout reprendre de zéro, vous avez l’impression d’être un hamster dans sa roue.
Au-delà de projets dont l’exécution est discutable, intégrer la qualité dans une organisation reste un réel défi.
Comment réussir à pérenniser des investissements projets déjà difficiles à obtenir?
Quels problèmes cherche-t-on à résoudre avec la qualité ?
Le développement, croissance et survie de l’organisation doit être la priorité de la qualité.
L’investissement en qualité logicielle doit supporter deux typologies d’enjeux :
- Capter de nouvelles opportunités
- Résoudre des problématiques identifiées
Les opportunités de croissance sont principalement supportées par la rapidité, la réactivité et la capacité d’ adaptation d’une organisation.
Pour les développer et les maintenir, la qualité de l’expérience client bout-en-bout s’adaptant aux besoins du client est un réel facteur différenciant.
Les exigences de sécurité, compliance, scalabilité, performance et maintenabilité sont également nécessaires même si rarement évoquées.
La qualité doit donc être au service de ces enjeux, en les intégrant au plus tôt dans la chaîne de valeur de création des produits digitaux de l’entreprise.
Plus facile à dire qu’à faire.
Quels défis existent pour les projets de qualité ?
Sans en faire une liste exhaustive, de réelles difficultés émergent régulièrement.
Le positionnement de la qualité en parallèle avec les usines en est une.
La qualité est souvent perçue comme une activité de contrôle en support du développement logiciel plutôt qu’à la stratégie de l’entreprise.
C’est ce qui la rend difficile à justifier par un ROI, comment une réduction du risque peut-elle apporter de la valeur à l’entreprise ?
Cette question reste biaisée de mon point de vue et mérite un article, la réduction du risque pouvant être valorisée positivement comme le font les assurances.
Une autre difficulté réside dans les modèles d’organisations.
Une qualité en silo dans sa conception, interactions et animation aura tendance à se refermer sur ses objectifs propres, loin d’apporter une valeur transverse.
Un autre effet de bord sera de ne pas réussir à intégrer et à pérenniser la qualité dans les processus où elle serait porteuse de valeur.
Certaines équipes doivent, comme pour des architectes, sortir de leur tour d’ivoire.
Quelles limitations aux projets et démarches de qualité ?
Les récits de projets de qualité terminant en pétard mouillé ne manquent pas.
Quelques exemples d’expériences relatées :
- Des campagnes de tests ignorées à la première livraison avec pression du PO
- Des tests clairs pour la QA mais peu compris des équipes produit et développement
- Des tests instables qui finissent par disparaître du radar des équipes
- Des tests lents ralentissant l’équipe et qui doivent être supprimés à la demande du Tech Lead
- Des notifications de tests avec un règle d’email automatique vers la corbeille
- La maintenance des processus et outils qui n’a pas été prévue
Au-delà de causes particulières et contextuelles, la vision de la qualité comme des projets isolés à mener est une problématique prépondérante.
Les projets ont tendance à être vus comme la livraison de livrables définis dans des critères de coûts, délais, qualité, exigences, etc.
Ils intègrent peu une contribution à un écosystème plus large et peuvent facilement sous-estimer les impacts de maintenabilité, représentant plus de 80% du Total Cost Of Ownership des livrables.
Il suffit donc de changer sa perspective pour une démarche qualité ?
C’est une première étape nécessaire pour donner du sens en considérant un projet comme une pierre à un édifice que l’on construit.
Faut-il encore avoir correctement défini à quoi servira cette construction.
Explorons donc les capabilities d’entreprise.
Que sont les capabilities d’entreprise ?
Plus souvent utilisées en architecture, les capabilities méritent de s’arrêter sur leur définition et d’en faire le possible parallèle avec la qualité.
“Les capabilities sont un concept d’entreprise important qui décrit les capacités ou les compétences d’une organisation, reliées aux enjeux et objectifs stratégiques de l’organisation.”
Les capabilities sont donc bien transverse et orientées métier, nous ne nous arrêtons pas à vision locale du système.
“Elles sont généralement assez stables et, bien que les processus, les fonctions et les rôles de l’entreprise changent assez fréquemment, les capacités changent moins fréquemment. Lorsqu’elles changent, c’est généralement en réponse à un moteur stratégique ou à un changement.”
Cette perspective de fondations ayant un cycle d’évolution moins fréquent que la partie émergée de l’iceberg semble être un bon investissement,
“Elles fournissent un point de départ utile pour cartographier les éléments de niveau inférieur tels que les processus et les fonctions métier, l’organisation, les applications et les actifs technologiques. Elles nécessitent généralement une longue période de temps pour être livrées, couvrent souvent plusieurs secteurs d’activité et impliquent plusieurs portefeuilles et projets.”
Elles nécessitent bien de réels investissements et une transversalité dans l’organisation, peu de raccourcis sont possibles.
C’est ce qui les rend également difficilement imitables, au bénéfice de se transformer en véritable avantage compétitif.
Pourquoi utiliser les capabilities pour la qualité d’entreprise ?
Utiliser les capabilities vient traiter les problématiques identifiées de la qualité dans l’entreprise, des projets et des démarches.
Leur adéquation à des objectifs stratégiques permet d’aligner et augmenter la proposition de valeur de la qualité avec les parties prenantes.
La visualisation des compétences stratégiques à développer permet d’identifier les processus transverses améliorés, facilitant également la construction d’un ROI par une analyse de coûts / bénéfices.
Sa perspective long-terme, au-delà de stratégies d’entreprises qui peuvent évoluer plus rapidement, rend son investissement plus durable et pérenne.
Cet horizon temporel est ce qui permet de donner du sens et une direction aux démarches et projets de qualité menés, à l’instar des OKR.
La développement de compétences stratégiquement sélectionnées est également ce qui permettra à l’entreprise de plus facilement réagir et de s’adapter.
La transversalité de mise en place d’une capability nécessite de raisonner globalement sur le système de l’entreprise, pour structurellement améliorer sa performance.
C’est ce qui permet d’éviter de tomber dans les optimisations locales souvent réalisées dans des silos organisationnels.
Un véritable avantage compétitif sera également le fruit du développement de ces capabilities, difficilement copiables par d’autres acteurs.
Que faire avec des capabilities de qualité d’entreprise ?
Les capabilities doivent permettre la réalisation d’objectifs stratégiques en créant des compétences organisationnelles durables.
Antoine Craske
Revenons à nos enjeux stratégiques, nous voulons réussir à :
- Délivrer du logiciel supportant les enjeux de l’organisation
- Réaliser des projets contribuant à réaliser les objectifs stratégiques
Nous pouvons donc nécessiter des compétences suivantes pour y arriver :
- Définir et communiquer les objectifs de l’organisation
- Aligner les priorités et fonctionnalités les plus pertinentes
- Identifier les exigences fonctionnelles et non-fonctionnelles
- Implémenter, tester et livrer plus rapidement nos logiciels
- Maîtriser la qualité de l’expérience utilisateur régulièrement mise à jour
- Mesurer l’adéquation du produits aux besoins des clients
- Détecter des opportunités de croissance et d’amélioration
- Améliorer l’apport de valeur le plus automatiquement possible
- Apprendre et améliorer nos processus en continu
- Intégrer durablement ces compétences dans les processus
Parle-t-on encore de qualité logicielle ou d’une fiche de poste pour notre entreprise ?
Difficile de choisir, la qualite montre ici son aspect transverse qui nécessite d’être intégrée transversalement dans l’organisation.
L’identification des capabilities est un pré-requis pour architecturer sa cible et trajectoire d’organisation permettant le développement de ces compétences.
Intégrer les capabilities dans vos projets de qualité
Le titre provocateur pouvait nous faire comprendre d’arrêter de faire des projets de qualité.
Il faut effectivement arrêter de faire des projets de QA isolés, sans contribution claire aux enjeux de l’entreprise, sans retour sur investissement pour l’organisation.
Les projets doivent contribuer au développement de vos capabilities stratégiquement choisies dans votre contexte.
Cette perspective de compétences transverse et stratégique est d’ailleurs ce qui pourra vous amener à adapter les projets que vous souhaitez mener.
Dans tous les cas, réussir à formaliser l’alignement de vos capabilities avec votre stratégie d’entreprise est nécessaire pour convaincre vos parties prenantes.
Quitte à choisir, investissez votre temps pour défendre le développement de compétences à long-terme plus qu’un projet isolé de qualité court-termiste.
Gardez-donc bien en tête la phrase suivante.
Stop Projects, Build Capabilities.
Antoine Craske