Combien de fois avez-vous participé à une réunion où le problème n’est pas identifié, énoncé ou écrit ? Personnellement, trop de fois.
Je me souviens d’entendre mon parrain dire « au travail, nous sommes payés pour résoudre des problèmes ». Cela m’a semblé négatif au début, mais avec le temps et avec l’expérience, j’ai ressenti ce qu’il voulait dire. Nous pouvons résumer le travail d’ingénierie à la résolution de problèmes techniques; nous devons bien résoudre les problèmes des clients et de notre entreprise.
McKinsey est l’un des cabinets de conseil les plus célèbres au monde, possédant une excellente réputation de services de conseil à la fois coûteux et de haute qualité. Les stéréotypes des tarifs élevés, des costumes noirs et des présentations parfaitement travaillées les suit. En réalité, leurs clients n’achètent pas les slides mais bien la possibilité de « changements transformationnels impactants ».
L’entreprise est connue en interne comme « The Firm ». Deux livres clés – « The McKinsey Way » et « The McKinsey Mind » – partagent certaines de leurs pratiques. Même s’ils sont un peu commerciaux, ils sont utiles venant d’une entreprise qui maîtrise le processus de résolution de problèmes dans des environnements complexes.
Cet article partage les enseignements du livre « The McKinsey Mind » qui vise à être applicable dans notre contexte de Quality Engineering.
L’importance d’un processus structuré
L’ensemble du livre tourne autour des processus clés de McKinsey pour résoudre les défis des clients ou le « Problème ». L’objectif est de structurer le raisonnement pour augmenter la qualité du rendu, dans notre cas le plan d’action préconisé, la « Solution ».
Le processus vise à équilibrer l’intuition et les données pour résoudre des problématiques complexes. Les données structurent l’analyse et leur présentation avec l’approche scientifique de l’exploration d’hypothèses basée sur les données. L’intuition laisse de l’espace pour compléter la solution avec l’instinct, des connaissances d’experts et la capacité humaine à générer des solutions.
Nous pourrions dire qu’il n’y a rien de nouveau – résoudre des problèmes est quelque chose que nous faisons tous quotidiennement – même la recherche de nourriture est une forme basique de résolution de problèmes. La principale différence entre les interventions de McKinsey est la complexité des sujets à enjeux élevés qu’elles doivent aborder. La difficulté réside dans l’exécution, pas dans la compréhension du processus. Entre-temps, les problèmes d’ingénierie deviennent également plus complexes pour nous tous.
Résoudre correctement les bons problèmes est l’un des risques identifiés pour le Quality Engineering. Nous pouvons faire face à différents problèmes allant d’un incident complexe, une sélection de scénario, à la réponse à une question particulière. Par exemple, si votre patron vous demande « Comment pouvons-nous améliorer d’un facteur 10 nos cycles de livraison ? », de l’intuition et des données seront nécessaires pour structurer votre réponse.
Soyez prêt, car le McKinsey Mind demande de savoir répondre en 30 secondes à ce type de question. Avant d’atteindre ce niveau, nous devons commencer « First Things First », en définissant le problème.
Structuration du problème, idées et raisonnement
Un problème bien cadré ne garantit pas une bonne solution, mais un problème mal défini ne conduira très probablement pas à des solutions de qualité.
Le principe MECE (mutuellement exclusif et collectivement exhaustif) est un modèle précieux que nous pouvons tous appliquer pour structurer notre raisonnement. Il s’agit fondamentalement d’une « liste de liste » permettant une réflexion plus large, hiérarchisée et ordonnée. Cette pratique vient de McKinsey, aidant à sous-diviser des problèmes complexes en lots de travail parallélisables pour une analyse plus rapide des hypothèses.
L’ingénierie est pleine de MECE. Par exemple, les exigences fonctionnelles et non fonctionnelles sont une première liste. Les exigences non fonctionnelles peuvent ensuite être déclinées en termes d’utilisabilité, de disponibilité, de sécurité, etc. De manière pragmatique, nous pouvons appliquer MECE à différentes tâches telles que notre analyse des exigences et notre conception d’architecture, nos projets.
MECE est puissant dans notre processus de résolution de problèmes lorsqu’il est matérialisé par un « arbre à problèmes ». Notre cadrage du problème, notre intuition et nos données initiales nous guideront pour définir les hypothétiques causes et les sous-causes associées. Les problèmes sont formulés sous forme de question auxquelles nous pouvons répondre par oui ou par non ; notre objectif est de répondre « non » le plus rapidement possible afin de réduire le nombre de questions à traiter.
L’étape suivante consiste à sélectionner les questions les plus critiques en équilibrant l’intuition et les données pour identifier leurs hypothèses basées sur les données. Cette étape est basée sur la méthode scientifique d’itération d’expériences basées sur les données pour en tirer des conclusions. Nous pouvons explorer nos améliorations de pratiques d’ingénierie avec cette approche, en veillant à ce que les données soient collectées en premier lieu. Par exemple, nous pourrions combiner Value-Stream, Process Mining et Data Science pour essayer de répondre à la question d’accélération de notre patron.
Les pratiques mentionnées soutiennent la « right analysis » ; l’étape suivante consiste à effectuer le « analysis right ».
Concevoir l’analyse correctement et efficacement
À ce stade de la résolution du problème, nous avons notre liste de questions, d’hypothèses et de sources de données potentielles à explorer. Avant de creuser dans les détails, la pratique de McKinsey est de s’assurer que les priorités analytiques sont définies.
Chaque point d’investigation est hiérarchisé à l’aide de différentes techniques. L’intuition est utile en tant que guide pour sélectionner les problèmes les plus importants de notre analyse précédente que nous pouvons combiner avec des connaissances d’experts. Répondre à la question de base « Et alors ? » est une pratique de triage efficace de McKinsey. Leur culture indique également de régulièrement prendre du recul sur leur impact « à la fin de la journée ». Le principe de Pareto est une autre pratique efficace faisant partie de l’exercice de priorisation, en pensant en « 80/20 ».
Le triage est une pratique fondamentale à appliquer au quotidien en ingénierie : prioriser le backlog, les réunions ou les tâches. Essentiellement, nous devons gérer le temps car il y a toujours plus de tâches que de ressources disponibles. Avec la tendance du temps à utiliser l’espace disponible, un manque de triage conduit à une mauvaise exécution et accumulation de problématiques. Le test final consiste à demander « Est-ce que intéresse mon patron ? », permettant d’éviter les tâches inutiles en premier lieu.
Nous pouvons maintenant travailler sur la collecte de données.
Recueillir des données significatives et précieuses
Chaque hypothèse repose sur des points de données que nous devons remplir. Une bonne pratique consiste à équilibrer les sources de données internes et externes, où les informations accessibles publiquement bénéficient généralement de données de référence et d’analyses intersectorielles. Ces données sont utiles pour la solidité de votre analyse, le gain de temps et la crédibilité de la restitution. Nous devons construire au fil du temps une liste systématique de références complétées en fonction de l’analyse en cours.
Des sources intéressantes existent pour notre contexte d’ingénierie. Le rapport Accelerate est une source que nous pourrions utiliser pour la question d’accélération de notre patron. Les normes des fournisseurs les plus importants tels que Google, les classements webperf sont également de puissantes références que nous pouvons utiliser. Le contexte est important dans notre analyse pour comparer les bonnes choses. Si vous comparez votre Start-up à Google pour les décisions d’investissement, ce serait trompeur. Même si vous êtes dans la même liste générale MECE des « entreprises technologiques », vous ne faites pas partie du « Top 10 des plus grandes entreprises du monde ».
Contre-intuitivement, les sources de données peuvent également provenir d’interactions humaines.
Posez les bonnes questions correctement
La conduite d’entretiens est l’une des pratiques standard de McKinsey utilisées tout au long du processus: de la définition du problème, priorisation à la génération de solutions. La gestion des connaissances est un défi de l’industrie, ce qui explique l’accent mis sur cette source de données compensant le manque de données terrain existantes. Nous ne pouvons pas nous fier exclusivement aux données des entretiens ; c’est un équilibre similaire à celui de l’intuition et des données.
Leur livre recommande ces 7 bonnes pratiques pour mener des entretiens efficaces :
- Demander au patron de la personne interrogée d’organiser la réunion
- Réaliser l’entretien en binôme
- Écouter, ne pas diriger
- Paraphraser, paraphraser, paraphraser
- Utiliser l’approche indirecte
- Ne pas en demander trop
- Utiliser la tactique de Columbo
Leurs recommandations sont relativement explicites. Celle de Columbo consiste à poser la question la plus importante en fin à la réunion pour obtenir des réponses spontanées. Ces pratiques sont adaptées pour réaliser des entretiens de consultation visant à collecter des données. Pour notre contexte d’ingénierie, écouter, paraphraser et ne pas trop en demander sont des habitudes pratiques à développer dans nos différentes interactions.
Même s’il n’est pas énoncé dans le livre, le principe de « Cherchez d’abord à comprendre avant d’être compris » par Stephen R. Covey dans Les 7 habitudes des personnes hautement efficaces prend tout son sens ici. Tout comme la résolution de problèmes nécessite plus de temps de cadrage que de la génération réelle de solutions, les interactions ne font pas exception ; nous devons écouter plus que parler. Nous avons mentionné le rôle de « Question Asker » dans un article précédent pour améliorer la qualité dans les organisations.
Notre analyse sera valorisée par une communication efficace.
Itérer pour créer une présentation à valeur ajoutée
« Ce n’est pas ce que vous dites, c’est comment vous le dites » est un bon résumé de l’importance des présentations. Gardez à l’esprit que l’équilibre entre l’intuition et les données s’applique également aux parties prenantes avec lesquelles vous interagissez de diverses manières.
Avant de partager avec quelqu’un en dehors de votre équipe de travail, la validation des données est fondamentale. Vous pouvez effectuer cela vous-même en réalisant les calculs à nouveau et des vérifications de cohérence. Investissez du temps ici pour éviter l’effet de château de cartes où quelqu’un peut ruiner votre présentation en deux secondes en signalant des données incorrectes. Un écueil traditionnel est de tirer des conclusions trompeuses mélangeant corrélation avec causalité.
Le peer review est une pratique efficace pour obtenir des commentaires externes sur votre travail, tant pour les données que pour la partie visuelle. Comme avec d’autres pratiques de qualité, une approche continue d’évaluation par les pairs apportera un maximum d’avantages. Vous identifierez les messages importants en appliquant la même question du « Et alors ? » en continu sur notre présentation.
Le format des présentations McKinsey est bien connu pour sa qualité globale. Certaines personnes peuvent plaisanter en disant que le prix par diapositive est relativement élevé. C’est en partie vrai car la valeur réside plus dans les changements mis en œuvre que dans les diapositives elles-mêmes. Comme pour un restaurant Michelin, vous attendez une présentation qualitative en plus d’un repas au niveau.
Certaines bonnes pratiques de mise en forme consistent à utiliser des titres et des graphiques explicites, à mettre en évidence les messages clés, à utiliser des polices standard et à limiter les couleurs. Toutes les sources de données doivent également être citées. McKinsey a également mentionné l’adaptation occasionnelle de la présentation en fonction du public.
La structure de la présentation est tout aussi importante que son contenu et sa mise en forme.
Présenter des idées pour favoriser le changement
McKinsey partage les ingrédients essentiels d’un message de présentation bien conçu. Leur expérience de partage des conclusions avec tant d’administrateurs et de cadres a contribué à créer une série de pratiques précieuses.
Contre-intuitivement, la première recommandation est de commencer la première diapositive par celle de conclusion. Nous sommes habitués à suivre la structure traditionnelle d’introduction, de développement puis de conclusion. La différence avec un exercice standard est que nous devons convaincre la solution au problème posé dans un contexte d’entreprise. Les cadres aiment généralement se sentir en contrôle, connaître les faits et savoir ce qui sera impacté. L’autre avantage est de s’aligner dès le départ en guidant la présentation ; les diapositives suivantes appuient la justification de la préconisation de la solution. Le résumé de la première diapositive n’est d’ailleurs pas le seul défi.
« Dans notre entreprise, il est utile d’obtenir un ou deux chiffres vraiment importants qui doivent être pris en compte. Il n’y a pas de temps pour plus. »
Ethan M. Rasiel
Le « 30-seconds elevator pitch » est une technique puissante de McKinsey pour évaluer la clarté de vos pensées sur le problème. Le test consiste à expliquer à quelqu’un en dehors de votre équipe de travail le problème, votre solution et la justification dans le délai imparti. C’est un véritable défi de transmettre le message important d’une manière claire, concise et solide. Nous pouvons même utiliser ce test de 30 secondes comme une évaluation continue pendant notre analyse et avant d’écrire notre première diapositive.
Nous pouvons étendre nos mécanismes de revue plus largement à l’étape suivante.
Gérer efficacement les parties prenantes
La présentation officielle n’est généralement qu’une formalité. Notre travail de revue précédent nécessitera un pré-partage avec les parties prenantes clés : Client, Équipe, et Soi.
Le Client doit être impliqué tout au long du processus. Le partage se fait généralement dans un format 1to1 pour créer un espace suffisant pour la discussion, identifier les objections possibles et améliorer la confiance. L’équipe bénéficiera de retours d’information continus sur la présentation tout en impliquant des personnes influentes dans sa construction. L’objectif des consultants McKinsey est de favoriser un modèle de communication pull plutôt que push en créant des opportunités d’engagement. Notre pratique de l’ingénierie peut être améliorée de la même manière par une implication au plus tôt, plus large et continue des parties prenantes.
Le deuxième groupe de parties prenantes est l’équipe. McKinsey partage des éléments clés de la sélection des membres, de l’adéquation culturelle et du feedback. Le cabinet a besoin de profils spécifiques pour remplir sa mission particulière, son vivier de talents s’articulant autour des écoles de commerce. Il est intéressant de noter qu’un principe de recrutement fondamental consiste à considérer le potentiel au moins aussi important que la capacité démontrée. La deuxième ligne directrice consiste à évaluer soigneusement l’adéquation culturelle à l’aide d’une série de questions comportementales ou d’exercices de dynamique de groupe. La dernière pratique pour une définition claire des objectifs et des feedbacks réguliers.
Le trio d’acteurs se termine par notre propre personne. Le rythme imposé par McKinsey demande une attention particulière pour recharger les batteries pour jouer sur le long terme. Il n’y a pas de magie ici, et certains points clés sont mis en évidence, même si leurs difficultés résident dans l’exécution. Le time boxing de l’agilité peut être appliquée au temps personnel planifié, même s’il est limité dans ces contextes. Le message clé est d’équilibrer autant que possible le temps non professionnel avec discipline.
Un repos qui est probablement plus facile à prendre lorsque la Solution est livrée.
Quels sont vos problèmes de Quality Engineering ?
Le partage de McKinsey est un processus reproductible pour résoudre des problèmes complexes. Leur expérience nous apporte une série de pratiques que nous pouvons appliquer dans notre contexte d’ingénierie.
Nous sommes tous payés pour résoudre des problèmes, et étonnamment, la gestion des problèmes est rarement formée à l’école, personnellement ou lors de sessions en entreprise. Je dirais qu’avant d’essayer de résoudre un problème, investir dans une capacité de résolution de problèmes serait une sage décision.
De manière pragmatique, expérimentez quelques pratiques sur des sujets concrets auxquels vous êtes confrontés au travail tout en assurant des mécanismes de revue par les pairs. On peut être surpris par l’effet d’améliorations continues partagées. Je recommande de lire Atomic Habits et d’explorer le Firm Learning, la chaîne youtube d’un ancien consultant de McKinsey.
Avec le temps, nous pouvons développer des capacités vraiment différenciantes qui font la différence à la fois dans la solution générée et sa présentation. « At the end of the day », développer les consultants internes à l’organisation les plus précieux est l’une de nos missions.
Références
Ethan Rasiel, Paul N. Friga, McKinsey esprit https://www.amazon.com/McKinsey-Mind-Understanding-Implementing-Problem-Solving/dp/0071374299
Ethan Rasiel, The McKinsey Way https: / /www.amazon.com/McKinsey-Way-Ethan-M-Rasiel/dp/0070534489/
Le principe MECE https://en.wikipedia.org/wiki/MECE_principle
Le principe de Pareto https://en.wikipedia.org/wiki/Pareto_principle
Stephen R. Covey, Les 7 habitudes des personnes très efficaces
James Clear, Habitudes atomiques https://www.amazon.com/Atomic-Habits-Proven-Build-Break/dp/0735211299
LaThe Firm Learning chaîne Youtube https://www.youtube.com/channel/UCsx-bX-BVBqsDwdxxzpOXMQ